axiomatique pulsionnelle
C’est à partir d’une réflexion sur la politique sauvage qu’a été élaboré le schéma d’une axiomatique pulsionnelle qui s’appuie sur Freud pour en contester l’application sociopolitique. Tout en contredisant la transposition qu’il en propose dans le champ politique, cette axiomatique reprend, en effet, le schéma du dualisme pulsionnel que Freud a forgé, après le tournant des années 1920, en introduisant la pulsion de mort au titre de spéculation métapsychologique :
C. Ferrié, Le mouvement inconscient du politique (2017), p. 34 et p. 268-274.
Dans ce travail, le schéma freudien du combat de géants entre Éros et Thanatos est réinterprété sous la figure d’une lutte à mort entre pulsion de vie politique et pulsion de mort polémique. Néanmoins, l’analyse des processus pulsionnels, à l’origine et au fondement de sociétés humaines aussi différentes que les communautés politiques autonomes et les sociétés de masse hétéronomes, exige de bouleverser l’axiomatique pulsionnelle admise par Freud au niveau des collectifs humains :
la pulsion d’union érotique qui préside à la naissance des États n’agirait pas dans le sens centrifuge de la vie politique d’une société vraiment civile. Au contraire, cette pulsion centripète ferait bien plutôt le jeu de la pulsion de mort polémique à l’origine de la destruction du politique comme milieu social de l’activité politique. En revanche, la pulsion de vie politique serait à l’origine de l’institution multiple de communautés politiques d’êtres humains égaux, libres et solidaires.
En raison de cette déclinaison trinitaire de la société politique, la pulsion sociopolitique d’égalité s’opposerait au désir d’inégalité, la pulsion politique de liberté au désir de soumission et la pulsion sociale de solidarité au désir de subordination hiérarchique. Telle serait l’axiomatique pulsionnelle d’une politique centrifuge, qui s’opposerait par principe au système centripète de domination polémique de sujets soumis : si la pulsion polémique des forces centripètes travaille à imposer aux forces sociales un système antisocial de soumission en contradiction avec l’idée même de société, la pulsion politique de ces forces sociales qui se constituent en associations autonomes opère, à l’inverse, dans le sens centrifuge d’une dynamique d’émancipation de tout système polémique.
Du point de vue de l’axiomatique pulsionnelle, l’objectif politique serait donc de contenir la pulsion de mort afin d’en prévenir le déchaînement polémique. Il y aurait, au niveau socioculturel, un véritable combat de géants entre pulsion de vie politique et pulsion de mort polémique, combat qui déciderait du destin du politique. Car la pulsion de mort polémique s’oppose, en tout point de la vie sociale, à la pulsion de vie politique.